Mbela Mambueni, le peintre sans maître

Culture

Infatigable bosseur. Artiste rigoureux dont la renommée dépasse désormais le cadre restreint de seules frontières de la République démocratique du Congo. Mbela Mambueni, peintre et sculpteur de 30 ans, va représenter son pays aux IXes jeux de la francophonie, dans la catégorie peinture. Une responsabilité oui, mais aussi une opportunité dont il espère transformer en tremplin pour la suite de sa carrière.

Lundi 26 juin. Il fait moins de 22 degré. l’air est frais et léger à Kinshasa, capitale de la RDC, pays hôte de la neuvième édition des jeux de la francophonie qui vont débuter dans près d’un mois. Il est 10h20 minutes quand mon bus, une Mercedes Benz ancien modèle me dépose à l’arrêt royal, en face de la Direction Générale des douanes et accises pour ceux qui connaissent Kin. À quelques mètres de là, je dois rencontrer l’artiste peintre. le rendez-vous a été pris il y a une semaine…

Après avoir traversé le grand boulevard du 30 juin, je prolonge droit devant. À une centaine de mètres, je me retrouve devant l’entrée du centre Maisha Park, qui abrite un restaurant, une grande enceinte, et des appartements pour location. Des œuvres d’art de différents genres y sont exposées aussi. Quelques artistes travaillent et vendent sur place, à même le sol pour certains.

À l’entrée, un jeune homme mesurant au moins 1m65 m’accueille. chevelure rasta, il est vêtu d’un t-shirt noir, et d’un pantalon jean bleu délavé laissant transparaître des marques de peinture. Tout sourire, il se présente comme pour me confirmer que c’est bien lui, et me demande de le suivre.

On gravit les marches des escaliers d’un appartement nouvellement refait. Au premier niveau, un couloir, qu’on suit jusqu’au fond. L’artiste ouvre la dernière porte à gauche, c’est dans cet endroit calme et sobre, un espace pas très vaste mais bien aménagé qu’est installé son atelier.

À l’intérieur je découvre des dizaines d’œuvres d’art. Des toiles attachées aux murs, des tableaux empilés minutieusement les uns sur les autres. Des sculptures en bois, des œuvres surréalistes aussi, réalisés à base des matières recyclées, des épingles, des factures, d’anciens journaux. L’endroit est captivant. Il est éclairé par deux ampoules, mais aussi par la lumière du jour qui s’infiltre à travers une fenêtre au dessus à droite.

Le propriétaire du lieu n’est pas un homme à perdre son temps, il sait que ça lui fait gagner de l’argent. Il n’attend pas mes questions, il donne déjà ses réponses. Sourire aux lèvres, voix aiguë. Il me raconte ses débuts, « J’ai commencé à faire de la peinture très jeune, grâce à mon grand-père qui est un artiste engagé dans l’agriculture. Un jour il m’a demandé de lui faire un dessin, il m’a laissé un papier et un crayon, et Il est parti au travail. À son retour, quand je lui ai montré le résultat, il en était fier. Il a amené ça à son travail le jour suivant pour montrer à ses collègues, ils étaient tous étonnés ».

Ce grand-père fier de son petit-fils, ne s’arrête pas là. Il décide avec la bénédiction des parents, d’inscrire Mbela Mambueni à l’académie des Beaux-Arts, où il fait les humanités artistiques. À l’obtention de son baccalauréat, il décide de rempiler avec l’université comme beaucoup de jeunes à son âge. Mais il se rétracte très vite, « J’avais compris qu’il est parfois préférable de quitter certaines choses pour plus tard revenir dans les meilleures dispositions. J’ai d’abord perfectionné ce que j’avais appris avant de rentrer à l’université », raconte t-il.

Revenir à l’université, c’est ce qu’il va faire quelques années après. Prêt cette fois-ci à livrer cette bataille et s’offrir son diplôme en peinture, puis en sculpture juste après, pour le besoin de la cause. Deuxième d’une fratrie de six, Mbela Mambueni est un artiste pur jus qui sait ce qu’il veut, et qui s’est fait presque tout seul. Loin des modèles ombrageux, des monstres sacrés et des maîtres incontestés.

« J’ai grandi dans la commune de Ngaliema, j’ai découvert tôt ma passion, je m’y suis entièrement consacré. Je n’avais vraiment pas de modèle, je voulais être mon propre modèle, je fais mon art pour être moi. C’est vrai que j’ai regardé des grands frères travailler dans leurs ateliers, mais j’ai toujours voulu me surpasser, repousser mes limites. Être le meilleur oui, mais à manière », dit-il.

Pas encore marié, Mbela Mambueni, est totalement plongé dans son travail, et ses efforts sont peu à peu récompensés, « j’ai été une fois en Suisse, en Belgique aussi pour des expositions. J’ai parcouru beaucoup de pays d’Afrique de l’Est. Je suis fier du chemin déjà fait ». Fier, oui, mais il espère aller plus loin encore, marquer son nom à tout jamais dans l’histoire de son pays. Et il a les moyens de ses ambitions.

Sélectionné pour représenter la RDC aux IXes jeux de la francophonie, dans la catégorie peinture, à l’issue d’un processus serré et coriace. Mbela a le secret pour impressionner, « je fais sérieusement mon travail. Je tire mon inspiration dans la beauté et la pureté de la nature. Je sais marier les couleurs et jouer avec les codes. Je rend vivant les masques, même ceux qui ne les appréciaient pas avant, sont éblouis devant mes œuvres.»

Conscient de la chance qu’il a de prendre part à un évènement d’une telle envergure, il espère en tirer toute la lumière, en profiter pleinement pour hisser la suite de sa carrière dans une nouvelle dimension. À la grande fierté de son pays, et de tous ceux qui on toujours cru en lui.

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